Non, mais sans déconner ?!
Je n'ai jamais voulu parler de Christophe, juste l'évoquer vaguement... Peut-être parce qu'il a mis en exergue le manque d'estime de moi que j'ai pu avoir, et ce, dans toute sa splendeur. Christophe est un type que j'ai rencontré il y a plus de dix ans, il couchait avec ma meilleure amie du moment que j'ai déjà évoquée (ici), the Queen. A l'époque c'est drôle, je le voyais comme un mec bien, et je déplorais que the Queen le délaisse "parce qu'il était trop sentimental". Le hasard qui ne fait pas toujours bien les choses m'a fait retomber sur lui il y a un an...
C'est étrange la vie, parfois on tombe amoureux pour un rien, une phrase, une faille chez l'autre qui nous rappelle les nôtres. A l'époque j'ai eu un vrai coup de coeur pour Christophe, j'aimais son côté rock'n'roll et "bon père" (il était papa d'un petit garçon dont toute personne normalement constituée rêverait d'être parent), sa façon d'embrasser à la fois fougueuse et sensuelle qui présageait des étreintes sublimes. En fait non... Christophe était tellement centré sur lui qu'il était incapable de s'intéresser vraiment aux autres, de donner du plaisir à sa partenaire sans se servir la plus grosse part. Pour la première fois de ma vie , j'ai vécu une véritable contradiction entre mon désir et mon plaisir. Ce mec qui mettait le feu à mes sens ne me faisait jamais jouir... du moins tant que je fus amoureuse de lui. Je me souviens d'une nuit où lorsqu'il eut joui comme un goinfre, il se retourna sans demander son reste. Je fus tellement affectée que je fus soudain prise par une crise de spasmes secs, pas de pleurs, juste mon corps secoué de soubresauts incontrôlables. Il finit par me demander ce que j'avais, je lui répondis:
"Je ne sais pas, c'est la première fois que j'ai une crise de panique sans larmes..."
Il aurait pu me prendre dans ses bras sans rien dire, me pousser à verbaliser, au lieu de cela, il me sortit laconiquement:
"Y a du Lexomil dans le premier tiroir du placard dans la salle de bain..."
Je me levai et tandis que je me rhabillais, il me demanda:
"Mais qu'est ce que tu fous Jeanne ?"
" Je vais prendre du Lexomil... mais chez moi, tu vois...? "
Et je m'enfuis en pleine nuit sans bien sûr qu'il ait pris la peine de m'accompagner à une station de taxis.
Si j'en étais restée là, j'en serais sortie grandie. Mais j'ai remis le couvert plusieurs fois avec lui. Certainement parce que j'en avais besoin pour me débarasser de mon obsession, de cette frustration de ne pas atteindre d'orgasme alors que chaque centimètre de ma peau était attiré par ce type odieux. Certainement aussi parce que je croyais dur comme fer qu'en étant patiente, il s'adoucirait.... Foutaises.
Je n'ai pas envie de m'éterniser sur notre relation minable faite de ruptures douloureuses et de retrouvailles foireuses, tout ce que je sais c'est que le jour où enfin j'ai pris mon pied avec lui, c'en était fini pour moi. Je me souviens de ce jour comme c'était hier. C'était en juillet dernier, nous gisions haletants et transpirants sur mon canapé après l'orgasme, moi estomaquée qu'il ait joui en moi alors que je l'avais prévenu que j'étais en pleine ovulation, et lui heureux de s'être vidé les couilles.
"Christophe t'as déconné ! Ça craint que tu aies éjaculé à l'intérieur !"
"Ben je croyais que tu prenais la pilule !"
"Tu plaisantes ou quoi, je t'ai dit que j'étais en plein milieu de mon cycle ! "
Et là il s'est levé, s'est rhabillé et m'a sorti un truc du genre "Putain tu fais chier Jeanne, c'est toujours compliqué avec toi !"
Ça m'a tellement sciée que j'ai éclaté de rire :
" Sérieux ?! T'as pas trouvé autre chose comme excuse pour te casser ? Attends si tu crois que je vais te faire un môme dans le dos, tu délires total, t'es une galère sur pattes Christophe... "
"Mais c'est pas parce qu'on a fait le test HIV que tu dois te passer de contraception !"
"Attends, pourquoi je prendrais une contraception alors qu'on se sépare tous les quinze jours... Franchement ! Allez va-t-en, c'est pathétique..."
Suite à cet épisode je suis restée sans nouvelle pendant six mois.
Et puis en rentrant de Thaïlande, je reçois un sms m'invitant à trinquer à la nouvelle année. Je réponds que je suis très prise par mon boulot mais il insiste. Après quelques échanges de textos, je le laisse s'inviter chez moi, certainement parce que je sais que l'attraction qu'il a eu sur moi est morte et enterrée depuis fort longtemps. Quand il arrive, je le trouve amaigri et blafard. Rien de ce qui attisait mes sens ne semble être encore en état de marche. Comme à son habitude, il ne fait preuve d'aucune empathie, d'aucun intérêt pour ma petite personne. En revanche, il prétend avoir changé et être prêt à entendre ce qu'on lui reproche. Je ne m'en prive pas. Je lui dis qu'il est certainement un bon père, un ami fiable mais un petit ami "à chier". Là dessus il s'insurge:
"Ouais mais je suis un super bon coup ! "
"Euh non..."
"Arrête, tout le monde me le dit !"
" Christophe, un bon coup c'est un type qui assure le service après vente, pas qui remet ses chaussettes dés qu'il s'est vidé les couilles..."
" C'est à dire SAV ? "
" Un minimum de complicité et de tendresse. J'ai une gueule de self-service, tu penses ? "
Il ne répond pas. Après ça, nous n'avons plus grand chose à nous dire. Je l'invite à quitter mon antre une heure aprés son arrivée, persuadée que je n'entendrai plus jamais parler de lui. Je me trompe.
Hier en fin d'après-midi, trois semaines après donc, je reçois un texto :
" J'ai envie de toi ! "
Comme ça, au milieu de nulle part, alors qu'il pleut des cordes et que le commun des mortels ne rêve que de gâteau au chocolat et de feu de cheminée...
"Ah ouais ? Et elle vient d'où cette envie ? "
"Je suis allongé, je me touche... je pense à ta langue."
" Ok t'as juste envie de te faire sucer en somme ! "
" Non envie de te lécher aussi et de te prendre encore et encore..."
" Putain Christophe, j'ai déjà donné, chaque fois nous deux c'est une catastrophe, même quand c'est bon..."
Mais il insiste, m'explique ce qu'il va me faire... et là, malgré ma faiblesse, malgré mes envies de sexe incontrôlées, mon cerveau reprend la main. Une colère froide s'empare de moi et je réponds :
"Arrête Christophe, on n'est pas sur la même longueur d'ondes, ce que je veux sera toujours plus que ce que tu peux me donner... "
Il ne répondra pas. Que pourrait il avancer devant tant de certitude ? Je ne suis pas fière, juste délestée de ma rancoeur. D'ailleurs dans un dernier élan je lui envoie :
" Et puis oublie mon numéro de téléphone. Merci. "
J'ignore si c'est une victoire sur lui ou sur moi, peut-être les deux d'ailleurs, mais là j'ai juste envie de sortir... ce que je fais malgré la pluie et la fatigue. Je ne le regretterai pas car ce soir là, je ferai la conne comme il se doit, c'est toujours mieux que d'avoir l'impression d'être une poupée gonflable....