Sur son chemin 2/2
"Mais pourquoi tu pleures Hyppolyte ? Y a rien de grave. C'était le risque, ça pouvait ne pas marcher nous deux..."
"Je sais mais j'ai tellement de soucis en ce moment. En plus j'aurais jamais du venir, je suis au bord de la faillite personnelle. C'était hors budget ce billet de train..."
"Euh... en même temps tu me l'as pas présenté comme ça l'histoire..."
"Je voulais pas t'ennuyer avec ça..."
Mouais... A ce moment là je sentis que si je ne réagissais pas très vite, j'allais me le traîner pendant trois jours encore.
"Écoute, c'est pas que je roule sur l'or mais si tu veux je te paye ton billet retour, ok ? "
(Je sais des fois, moi aussi je me foutrais des claques...)
"Non Jeanne, il est hors de question que je profite de toi... Je vais appeler mon oncle demain pour qu'il m'héberge et je partirai dans trois jours comme prévu."
Alors nous passâmes encore une soirée interminable ensemble. J'acceptai même que nous partagions le même lit alors que je n'avais qu'une envie, qu'il disparaisse. Pourquoi m'infligeais-je cela ? Certainement parce qu'à ce moment là encore, je le voyais juste comme un type un peu paumé mais pas méchant que je m'en voulais horriblement de mettre dans une situation embarrassante. Putain d'éducation judéo chrétienne.
Le lendemain, il me proposa d'aller au parc prendre le soleil.
"Tu penses appeler ton oncle quand ?"
"Vers 11h, il est trop tôt là..."
Nous allâmes donc au parc. Là, il recommença à me parler de ces histoires. Il me raconta comment il avait débarqué à Dubaï pour déclarer sa flemme à une fille qui s'était installée là bas et qui l'avait repoussé sous prétexte qu'une de leurs connaissances communes avait dit "pique pendre" de lui. D'ailleurs il l'avait aussi poursuivie en justice celle là, pas l'objet de ses pensées, ma sa détractrice. Plus les heures avançaient plus je sentais que face à moi, j'avais un vrai dingue, un énorme parano. Et là j'ai dit :
"Bon tu l'appelles ton oncle ?"
Inutile de dire, que l'oncle en question refusa de l'héberger sous des prétextes fallacieux. J'osai :
"Putain il est pas cool ton oncle ! "
Il répondit stoïquement :
"Il a certainement appelé mes parents..."
Qui aurait pu lui reprocher ? Même ses parents refusaient la médiation, et je commençais à comprendre pourquoi. Peu à peu la liaison entre le corps et le cerveau se faisait.
"Hippo, je suis désolée, mais va falloir que tu partes maintenant. Je travaille dans deux heures et j'ai besoin de mon heure de silence et de solitude avant de décamper..."
Là il ouvrit la porte en grand et tel un tragédien il sortit. Je lui demandai:
"Tu vas à la gare de Lyon là ?"
Il répondit :
"Je ne sais pas... Je vais marcher un peu dans Paris, après je verrai ! "
Après tout, ce n'était plus mon problème... Du moins le croyais-je...
C'est là que les vraies emmerdes ont commencé.
J'ai fait une erreur. En voyant sur sa TL qu'il avait écrit "Colère !", au lieu de le laisser s'énerver tout seul, je lui ai écrit un texto :
"Je t'ai proposé de payer ton billet, j'ai été sincère, peut être fuyante mais est ce que je mérite ta colère ?"
Ce message marqua le début d'une série de textos de sa part complètement hallucinants alternant
-les reproches, je n'avais pas respecté le contrat (euh lequel ?), je l'avais foutu dans la merde... J'étais une égoïste.
-les mots doux, je tournais selon lui le dos à une belle histoire, il m'appelait "ma chérie", "mon coeur" semblant se foutre complètement que je lui dise que ça n'allait jamais se faire...
-Et les menaces quand je n'allais pas dans son sens "Tu veux la guerre, et ben on va se faire la guerre et tu ne vas pas avoir le dessus"
Au final il avait passé la nuit à errer dans Paris pour s'incruster de force chez son oncle au petit matin.Il me l'appris evidemment par sms mettant évidemment la faute sur mon inconséquence.
Je n'eus jamais peur de le retrouver devant ma porte avec un couteau ou des intentions physiquement dangereuses pour moi, je savais que c'était un procédurier et un emmerdeur, mais pas un violent. Je voulais juste qu'il passe à autre chose, et j'essayais de le raisonner, en vain.
Je finis par envoyer un mail à mon psy qui passait ses vacances à New-York et il me rappela dans la foulée :
"Eh bien Jeanne, on dirait que vous avez levé du lourd cette fois ci... "
Le ton était donné. B.L avait lu les mails que Hippo m'avait envoyés.
"C'est ce qu'on appelle un vrai pervers narcissique, ça y est vous en avez trouvé un, un authentique, avec le complexe de Dieu et tout le toutim. Alors écoutez, il n'y a pas 2 façons de faire, vous ne répondez plus à aucun de ses messages, et vous mettez une main courante au commissariat et s'il continue vous portez une plainte contre lui, histoire qu'il vous lâche...."
Ce que je fis...
Je l'en avertis bien sûr avant de porter plainte, mais sa réaction fut telle qu'il ne me laissa pas d'autres choix. Après ça je prévins quelques personnes sur Twitter en relation avec lui, essentiellement les filles avec qui j'écrivais sur l'autre blog et une autour de laquelle il tournait et à qui je voulais éviter pareille aventure.
Parfois les choses vous échappent... surtout sur les réseaux sociaux. Mes collègues du blog en apprenant mon histoire le provoquèrent et surtout se moquèrent de lui, ce qui le rendit fou de rage. A partir de ce moment là, je compris réellement l'ampleur de sa folie. Il menaçait tous les gens qui l'approchaient à ce sujet de les poursuivre en justice s'ils prenaient ma défense. Il tenait compte de toute la procédure, de tous les courriers qu'il allait envoyer, c'était à la fois pathétique et oppressant. Penser que j'avais failli coucher avec ce dégénéré me filait une nausée sans nom.
Le pire c'est que la personne à qui j'en voulais le plus, c'était moi, désireuse de tomber amoureuse à un tel point que j'avais fait venir un inconnu de la Drôme, et que j'étais tombée sur un pur agité du bocal.
Après avoir cessé de m'envoyer des textos, sans doute calmé par le coup de fil du brigadier qui avait reçu ma plainte, je reçus encore plusieurs mails de plusieurs pages tentant à me démontrer que c'était moi la méchante dans l'histoire, et que malgré l'affection qu'il me portait, j'en tirerais les conséquences devant la justice pour l'avoir traîné dans la boue, porté atteinte à sa vie privée et menti à des tiers à son sujet. Il concluait son mail par : "C'est le moment de présenter tes excuses..."
Encore tout récemment, j'ai reçu une copie de sa plainte avec constitution de partie civile qu'il était soi disant sur le point d'envoyer et dont le contenu, ramassis d'inepties, était illustré par des articles du code pénal qui n'avait rien à voir avec ses arguments mais qu'il avait interprété à sa sauce.
Ce qui était drôle c'est outre qu'il reclamait 3000 euros de dommages et intérêts, il demandait des TIG à mon encontre dans une association défendant les victimes de harcelement psychologique. J'ai cru m'étouffer en lisant ce passage. Il terminait ce mail par :
"Je suis sincèrement triste d'en arriver là avec toi, cela ne m'apporte ni plaisir ni satisfaction. Je pense que tu me connais assez pour en être convaincue.Prends soin de toi."
Ce que je retiens de cette rencontre n'est certainement pas d'éviter les rencontres via internet, ou de ne faire confiance à personne. Mais d'arrêter de me pièger toute seule en acceptant des situations qui ont une chance sur deux de virer si ce n'est au cauchemar, en tout cas à la grosse galère. J'aurais du exiger qu'il prenne un hôtel dès le début pour ne pas me retrouver dans cette situation détestable.
Pour le reste j'ai fini par me pardonner d'avoir cru un instant à la magie d'une rencontre improbable au détour d'une phrase mieux tournée que les autres, un jour du mois d'Aout dans un Paris bien dépeuplé...